Retrouvez le regard de cinq spécialistes du football africain sur les six équipes qualifiées du continent pour la Coupe du Monde 2010.
Roger Milla, ancien international camerounais
«Les équipes africaines peuvent réaliser de grandes choses à condition qu’elles soient unies. Pour le Cameroun, j’attends 23 conquérants jouant pour la patrie. Ça sera difficile de passer le premier tour. Si on y parvient, on est capables d’aller très loin. Avec les jeunes que l’on a, je suis confiant. Samuel Eto’o a reçu le brassard. Il faut qu’il amène son équipe au sommet. Je voudrais que Samuel montre l’exemple, qu’il soit le porte-parole de tous les joueurs. Un papa ! J’ai juste dit qu’il n’avait encore rien apporté à l’équipe. Ce n’est pas une critique, mais la vérité.»
Issa Hayatou, président de la Confédération africaine de football
«Les six équipes africaines engagées ont le même niveau que les autres équipes mondiales. Elles peuvent battre n’importe qui. L’Afrique a souvent été handicapée par le petit nombre d’équipes qualifiées. Avec six représentants cette année, on peut espérer être dans la mouvance générale des autres continents. Beaucoup d’Africains évoluent dans les grands clubs européens, mais lorsqu’ils reviennent dans leur circuit traditionnel ils sont confrontés à l’amateurisme. Sur le plan de la compétence, des qualités physiques, techniques et tactiques, nous n’avons rien à envier à personne, mais le manque de discipline collective et l’absence de recul nous jouent des tours. Les joueurs se laissent rapidement envahir par le succès.»
Philippe Troussier, ancien entraîneur de la Côte d’Ivoire et de l’Afrique du Sud
«Globalement, le foot africain a nettement progressé. La plupart des joueurs évoluent à l’étranger. Les fédérations africaines s’entourent d’encadrement technique de haut niveau, souvent des Européens ou des Brésiliens. Cela permet de donner une maturité et une assise tactique aux sélections. Sur le plan de la stratégie, de la qualité des individualités, une équipe africaine est capable de remporter le Mondial. Sur le plan théorique, la Côte d’Ivoire est la favorite de l’Afrique. Mais compte tenu de ses adversaires (Portugal, Brésil), elle aura plus de difficultés à passer le 1 er tour que le Ghana ou le Nigeria. Le contexte africain pourrait prendre sa pleine mesure dans les matchs à élimination directe. Les Africains vont se sentir investis d’une responsabilité. Cela pourrait leur permettre de saisir une chance historique.»
Jean-Marc Guillou, fondateur de plusieurs académies de football en Afrique
«Par rapport à ce que j’ai vu de la CAN, les sélections africaines n’ont aucune chance d’aller au bout. Pas par manque de potentiel, mais parce qu’elles sont mal dirigées. Le football africain n’a pas progressé ces dernières années. L’Égypte reste de loin la meilleure équipe du continent mais elle n’est pas qualifiée. Le Cameroun, c’est moyen. Le potentiel de la Côte d’Ivoire est gâché par un environnement nul. Les joueurs ivoiriens n’ont pas fait preuve d’assez de caractère et d’unité pour leur imposer leurs vues. Plus généralement, l’écart énorme entre les revenus des vedettes jouant en Europe et ceux des joueurs locaux peut avoir des répercussions dans la construction des équipes.»
Aimé Jacquet, ancien sélectionneur de l’équipe de France
«J’attends beaucoup du football africain qui sera en terrain conquis. J’espère que cela apportera beaucoup de joie et d’enthousiasme. Je vois bien une équipe africaine aller loin. Le Cameroun, le Nigeria, la Côte d’Ivoire et le Ghana peuvent s’appuyer sur des joueurs très talentueux. Cela ne m’étonnerait pas qu’une de ces équipes s’invite dans le dernier carré.»